Il y a 25 ans, la famille Colin s’affranchissait du système coopératif dans lequel elle évoluait depuis le XIXe siècle pour exprimer sa propre vision du champagne. La maison s’appuie sur un vignoble de 10 hectares à Vertus, au sud de la Côte des Blancs, et sur des terroirs classés premier cru et grand cru.
Par Xavier Aubercy
En cette saison, le spectacle est saisissant. Les vignes jaunies prennent un reflet roux quand le soleil décline et semblent couronner un terroir d’exception dont elles sont en effet les reines. C’est en plein royaume du chardonnay, à Vertus, au sud de la Côte des Blancs, que la famille Colin est installée depuis le début du XIXe siècle. En 1995, Richard Colin et son épouse Delphine, accompagnés par Romain Colin, décident de s’affranchir du système coopératif dont ils ne partagent plus la philosophie et créent alors leur propre cuverie pour devenir vignerons indépendants. Non sans atout puisque la septième génération de la famille peut alors compter sur un vignoble de dix hectares légué par les aïeux, sur ces terroirs classés premier cru et grand cru.
Sur ces terres bien nommées de la Côte des Blancs, la maison Colin, encore confidentielle, cultive essentiellement du chardonnay. Quelques pinots meuniers sont également plantés à Sézanne et du pinot noir à Vertus. Depuis 25 ans, la famille travaille à l’élaboration de grands champagnes riches de finesse et d’élégance, à l’image de leurs terroirs. Pour cela, le domaine, certifié HVE – Haute valeur environnementale – niveau 3, mise sur des vendanges manuelles à maturité et sur une presse lente destinée à extraire le jus le plus pur. Chaque cru est vinifié séparément. Et c’est à l’assemblage que Richard, Delphine et Romain Colin se réunissent pour décider des alliances entre les terroirs afin d’élaborer leurs cuvées, généralement peu dosées.
En 2005, s’appuyant sur un millésime idéal tout en s’inscrivant dans la tendance champenoise à élaborer des vins à la bourguignonne, en parcelles, Colin a imaginé une cuvée spéciale, parcellaire, qui devait devenir son fer de lance : les Prôles et Chétivins. Elaborée les seules années exceptionnelles, cette cuvée de gastronomie extra-brut, blanc de blancs, laisse une grande force d’expression aux vignes des années 60 dont elle porte le nom, et dont la récolte exige la plus grande rigueur. Robe or aux reflets bronze, grande complexité – fleurs blanches et viennoiserie au nez, notes torréfiées et citronnées en bouche – caractérisent cette cuvée 2006 bénéficiant d’un vieillissement de plus de 10 ans en cave. Le millésime 2008 prendra sa suite.
Coup de coeur de la rédaction de L’Honoré Magazine, la cuvée Rosé de Saignée, millésimée 2013, est l’autre cuvée rare de la maison Colin. Ce champagne, élaboré entièrement avec les pinots noirs d’un terroir premier cru de la Côte des Blancs, à Vertus, peut se targuer d’avoir vieilli 5 ans en caves et six mois après dégorgement. Après une courte macération des raisins, la saignée est effectuée lorsque les pigments naturels contenus dans la peau des pinots noirs colorent suffisamment le jus et l’imprègnent de leurs saveurs. Ce champagne vineux, à la robe rose profond et aux bulles fines, s’ouvre sur un nez intense de fruits rouges et offre une bouche gourmande qui en fait un vin de gastronomie idéal sur la volaille et sur certains fromages.