Présenté pour la première fois en 2006, le Double Tourbillon s’affranchit aujourd’hui de cadran, révélant la beauté mécanique de cette pièce pour collectionneurs – très – avertis.
Par Olivier Müller
Breveté par Abraham-Louis Breguet en 1801, le tourbillon est un type d’échappement horloger, c’est-à-dire un mécanisme qui permet d’assurer à la montre un degré élevé de précision. Son fonctionnement part du principe que la montre occupe diverses positions au fil de la journée – horizontale, verticales et tous les plans inclinés entre deux – qui altèrent sa précision. Schématiquement, c’est l’image d’une pendule comtoise qui ne serait pas posée à plat : dès qu’elle serait inclinée, instable, son long balancier n’oscillerait plus de manière parfaitement symétrique. A l’échelle d’une montre, le tourbillon corrige cela en « brassant » toutes les positions de la montre de manière à produire une moyenne de marche la plus stable possible.
Le Double Tourbillon est un exercice complexe que peu de maisons maîtrisent – encore moins 100 % en interne. Dans un espace très restreint, la manufacture Breguet a créé un univers complexe et harmonieux. L’ensemble du mouvement mis à nu pivote sur lui-même au rythme d’un tour en 12 heures. Il est mu par deux tourbillons indépendants, accomplissant chacun une rotation complète en 1 minute. Connectés, les organes réglants effectuent ainsi une double révolution.
Ces deux cœurs mécaniques battent indépendamment l’un de l’autre, chacun alimenté en énergie par un barillet qui lui est propre. Mais les deux organes oscillants sont couplés à une seconde paire de rouages, lesquels viennent se jeter dans un différentiel central. Ce mécanisme à double entrée est capable de déterminer la moyenne de marche des tourbillons, lui permettant d’entraîner l’ensemble de la platine à raison d’une révolution en 12 heures. Un spectacle étonnant qui met en scène des composants en or, comme l’étaient ceux des Grandes Complications de l’époque – une tradition aujourd’hui quasiment perdue, que Breguet s’attache à perpétuer, comme peut le faire l’horloger indépendant François-Paul Journe.
Côté fond, accomplie à la main, foisonnant de détails, une gravure représente la façade de l’édifice que A.-L. Breguet a occupé dès 1775, au 39 Quai de l’Horloge à Paris. Réalisé dans de l’or, l’œuvre est d’une telle minutie que les carreaux des fenêtres laissent entrevoir les rouages du calibre.
Notre avis : “Difficile de rester insensible à ce nouveau Double Tourbillon de Breguet. L’exécution est magistrale, au même plan que la maîtrise technique. On apprécie l’équilibre entre tradition et modernité : la pièce n’est pas « classique », ni trop moderne, elle est une création de son temps qui s’appuie sur deux siècles d’histoire – s’appuie, mais ne se repose pas. L’ajout d’un bracelet très contemporain rend ce Double Tourbillon terriblement attractif même si hors de portée de la plupart des collectionneurs (env. 590 000 euros).” Olivier Müller