Méconnu, le métier de conservateur est indissociable de la transmission : d’une culture, ou encore d’un savoir-faire. Un magnifique ouvrage vient de paraître, emportant le lecteur dans un véritable voyage tout en lui permettant de pénétrer au sein de lieux mythiques et difficilement accessibles pour le grand public.
Par Timothé Guillotin
C’est un métier encore méconnu du grand public. Alors, de prime abord, nous pourrions imaginer que le conservateur est au musée ce que le chef d’orchestre est à l’Opéra : celui qui organise, qui préserve et qui, de facto, consacre son quotidien à faire vivre l’institution qu’il représente. Pourtant, en interrogeant ces garants du patrimoine sur les enjeux liés à sa profession, vous les entendrez, sans aucun doute, évoquer, d’emblée, la notion de transmission. Transmettre, une culture, un savoir-faire, l’engouement pour un artiste, un courant ou une période demeure en effet essentiel à leurs yeux. Vient ensuite, la séduisante et non moins importante idée, de faire voyager le public dans le temps et l’espace.
Pour arriver à leurs fins, les conservateurs redoublent chaque saison d’ingéniosité en organisant des manifestions toujours plus créatives afin de mettre en lumière. Aussi, certains usent parfois d’outils somme toute classiques, comme la publication d’un ouvrage, qui, à condition d’être parfaitement réalisés, peuvent s’avérer très efficaces. Les 100 trésors des bibliothèques militaires présente le double avantage d’emporter le lecteur dans un véritable voyage tout en lui permettant de pénétrer au sein de lieux mythiques et difficilement accessibles pour le grand public. Document patrimonial exceptionnel, le livre est le fruit d’un travail minutieux réalisé par les conservateurs des cinq principales bibliothèques militaires françaises : Polytechnique, Saint Cyr Coëtquidan, École militaire, le Service Historique de la Défense et le service historique des armées. Pendant près de deux ans, chacun s’est appliqué a sélectionner ses plus belles pièces afin qu’elles soient réunies en un seul et même ouvrage. L’Honoré Magazine dévoile en exclusivité quelques unes des plus belles archives. Là aussi, avec la volonté de transmettre.
Construit en six parties, le livre Les 100 trésors des bibliothèques militaires s’ouvre par un thème historique incontournable : la guerre. Ce premier chapitre est titré L’art de la guerre en référence au traité de stratégie militaire du chinois Sun Tzu. Il nous entraîne dans les hauts lieux de l’Histoire militaire à travers pléthore de cartes manuscrites, de plans de champs de bataille et de reproductions de scènes de combat. Au milieu des ces archives, se glissent aussi des documents plus étonnants à l’image d’un guide du parfait aide de camp daté de 1760 qui exhorte les officiers novices à « être jeune de corps et vieux d’esprit ».
Dans la seconde partie, la « Découverture du monde », l’ouvrage nous promène à travers les continents : des îles Canaries au bassin du Mékong en passant par l’Australie et la province de Rio de Janeiro. Nous sommes invités à embarquer dans ce long périple aux côtés des plus prestigieux explorateurs tels que Guillaume Le Testu ou Marco Polo. Immédiatement, il apparait que l’exploration de la surface terrestre restera un inégalable facteur d’évolution. Chaque nouveau territoire apporte en effet son lot de matières à penser, de traditions à découvrir et de connaissances à développer. C’est d’ailleurs de cette connaissance, scientifiques et techniques, dont il est question dans la troisième partie du livre. Nommée, « Sciences & Technologies », elle fait la part belle à la mécanique, à la faune et la flore, à l’anatomie ou encore à l’univers marin. Nous découvrons également les techniques médicales d’époques avec par exemple un manuel de bandages et appareils à l’usage des chirurgiens de l’armée.
Place ensuite à une totale immersion dans la vie des militaires d’antan. Là encore, nous pouvons constater le progrès au fil des siècles à travers les représentations des différents outils du quotidien des soldats : véhicules, livres de gymnastique, instruments médicaux… Ce chapitre introduit la passionnante notion de la communication des armées grâce, entre autres, aux affiches et autres documents de propagande.
Avant de présenter les cinq bibliothèques dans une sixième et dernière partie, nous pouvons retrouver quelques pièces aussi uniques qu’inclassables dans le chapitre intitulé « Surprise et curiosité ». Mention spéciale aux recettes de cuisine typique d’un Paris en état de siège. Édité pendant la guerre de 1870, alors que l’hiver se fait rude et pauvre en réserve alimentaire, ce texte propose entre autres réjouissances, le civet de chien et la ragout de chat…
A l’instar de l’activité des conservateurs, les bibliothèques militaires restent un univers méconnu. Elles gardent pourtant en leur sein certains des plus beaux joyaux de l’Histoire mondiale.