Rares sont ceux qui connaissent Alexandre Meerson – encore moins les collectionneurs d’horlogerie. La marque cultive sa discrétion, sa créativité et, plus encore, sa proximité avec chaque histoire personnelle. Découverte d’une maison atypique.
Par Olivier Müller
Doucement, mais sûrement – adagio. Alexandre Meerson n’est ni suisse ni horloger mais a les codes des deux. L’homme a créée sa petite entreprise horlogère éponyme en 2007 et n’a présenté son premier modèle qu’en 2014. A ce jour, 150 pièces ont été vendues. La plupart du temps, il les livre lui-même chez ses clients, en Europe ou aux Etats-Unis. Il connaît personnellement chacun d’eux. Un modèle atypique, fondé non pas sur la croissance commerciale mais sur la proximité et la rareté. « Mon but, c’est la création. Une pièce sur deux a été personnalisée d’une manière ou d’une autre pour son destinataire », explique Alexandre Meerson. « La marque n’a pas vocation à éditer de grandes séries mais à restituer toute sa place au design et à la créativité ».
Sans marketing ni ambassadeur de prestige, la croissance est plus lente mais plus solide. C’est en 2018 qu’Alexandre Meerson atteint pour la première fois son équilibre financier. Il repose sur un modèle de vente directe de quatre collections au style classique mais affirmé, à l’instar du chronographe Mutiny qui revendique un héritage « années 80 » encore peu exploré en horlogerie.
Baigné dans l’univers horloger dès sa plus tendre enfance, Alexandre Meerson est le fils d’Emerich Meerson, designer actif des années 50 à 70 avec des pièces à quartz vendues jusqu’au Japon, un marché que son fils exploite toujours avec sa propre marque. Alexandre, lui, a choisi une orientation Swiss Made. Les mouvements de ses quatre collections sont automatiques. Ils sont produits par Vaucher Fleurier, Dubois Dépraz ou Concepto, motoristes reconnus de la place horlogère. Les boîtiers sont en or ou en titane, avec un premier prix avoisinant les 9 000 euros.
Aujourd’hui, Alexandre Meerson se rapproche des femmes. Une cinquième collection est en voie de finalisation, la Palatine, avec une boîtier de 28 mm (or et / ou titane) accueillant un mouvement quartz. Une fois encore, le designer a fait les choses à sa manière. « Initialement, j’étais parti sur la déclinaison réduite d’un modèle masculin. Même si c’est ce que tout le monde fait, ça n’a évidemment pas fonctionné et j’ai décidé de reprendre à zéro », explique l’intéressé. « J’ai donc créé un projet spécial, baptisé Anna. J’ai rassemblé 3 000 femmes, créé un groupe Facebook dédié, organisé des dîners, des centaines d’interviews, pour comprendre exactement ce que devait être une montre Alexandre Meerson pour femme ».
La démarche, originale, rencontre un succès hors norme. Plus de 800 personnes adhèrent au groupe Facebook, une centaine se déclare prête à participer au lancement de la pièce. Les femmes s’engagent dans le processus créatif, échangent, commentent, donnent leurs avis…et partagent même des photos de leurs voitures préférées ! Les idées fusent, à l’image de cette montre en or satinée, une pièce unique si réussie que la marque en fera probablement une édition limitée prochaine. A nouveau, il y aura peu d’élu(e)s, mais telle n’est pas la vocation de la marque, même si elle prévoit l’ouverture de ses premiers points de vente dans les mois à venir.
A 47 ans, Alexandre Meerson n’est « plus tout jeune, mais pas tout vieux encore ». A contresens des marques qui déballent des dizaines de nouveautés tous les 12 mois lors des grands salons, il n’aime rien d’autre que s’assoir face à ses clients pour les écouter raconter leur vie, leurs envies, leurs passions. A l’image de cette surfeuse, qui voulait une montre à son image mais sans savoir la concrétiser. Alexandre Meerson lui a dessiné un cadran dont les variations de bleu sont celles de chaque océan où elle a posé sa planche. Un luxe simple mais personnel et totalement unique – le vrai luxe, en somme.