Quel est le seul vêtement que vous pouvez mettre aussi bien le vendredi au bureau que le samedi soir au théâtre ou le dimanche pour bruncher avec l’agaçant nouveau fiancé de votre sœur ? Si vous pensez à vos baskets, je ne vous félicite pas : tout était dans le titre.
Par Raphaël Sagodira
Le blazer n’est pas seulement une veste sans pantalon assorti : c’est également un vêtement qui répond à beaucoup de codes. Exécutées avec brio, le respect de ces règles fait de vous l’homme le plus élégant de la salle : ni trop apprêté, ni pas assez. À l’inverse, ignorer ces codes vous donne un air de nostalgique de l’UDR ou, pire, de mauvais commissaire-priseur.
Si le mot blazer vous évoque une météo épouvantable, le gin tonic et une certaine idée de l’humour qui n’est pas sans agacer le français en vous, c’est à raison : le blazer est un vêtement anglais. Il serait apparu en 1825, porté par les membres du club d’aviron du prestigieux Saint John’s College à Cambridge. Les membres du Lady Margaret Boat Club le portaient alors d’ « un rouge éclatant », ce qui se traduit en dialecte local par « a blazing red ». Une veste courte bien pratique, à une époque où l’on s’habillait couramment en frac et en redingote ! On raconte aussi que le blazer devient un vêtement si populaire chez les civils au XIXème siècle qu’il est même adopté comme uniforme par la marine britannique : il est alors bleu uni ou rayé de blanc et à boutons dorés. Certaines légendes mentionnent ce port du blazer à bord du HMS Blazer vers 1837… mais rien ne le prouve. En revanche, ce qui est certain, c’est que le blazer était un vêtement incontournable de la garde robe des Mods du Swinging London. De son origine, ne retenez que le cool des Beatles et oubliez les évocations martiales.
Je sais bien que vous avez peur du « bla-zaire » trop grand, trop long, à boutons dorés, voire à écusson, ringardissime, que votre mère oblige votre père à porter pour aller à l’Automobile Club. Rassurez-vous : celui qu’il vous faut n’a rien à voir avec ça. Le vôtre est moderne et simple. Plus court que vos vestes habituelles, il est coupé dans un drap texturé tel qu’un natté de laine pour se différencier vraiment de vos costumes. C’est une veste droite à deux boutons, à cran sport et avec des revers de largeur moyenne – laissez les petits revers à ceux qui veulent rester d’éternels stagiaires. Pourquoi ne pas choisir un modèle à poches plaquées ? Votre veste fera plus décontractée.
Si vous aimez vous déguiser, vous pourrez toujours porter la panoplie complète : un blazer avec une cravate club rayée, un pantalon gris moyen et une paire de mocassins à pampilles. C’est pourtant inutile : vous l’avez tant rabâché à tout le monde, votre fameux semestre d’été à Oxford ! Optez pour un air plus contemporain avec une chemise claire, déboutonnée et un pantalon gris souris qui peut être blanc l’été. Pour dîner chez vos collègues, un jeans est acceptable. En revanche, en porter au restaurant pourrait être un motif valable de divorce. Quant aux chaussures, laissez les Richelieu au placard : une belle paire de derbys à deux œillets très habillée sera parfaite le soir, quand une paire de derbys chasse en cuir grainé sera idéale avec un jeans.
Si l’occasion est spéciale, avant de partir, n’oubliez pas de compléter votre tenue par une pochette de soie colorée, rapidement fourrée dans la poche poitrine. Dépêchez-vous, enfin ! Le taxi pour le théâtre vous attend.
- Nos deux adresses Blazer :
- ATELIER DE LUCA. Emanation de la grande maison de tailleur Camps de Luca – Entreprise du Patrimoine Vivant – encore familiale. Infos : www.atelierdeluca.com – 11 Rue des Pyramides , 75001 Paris – tél. : 01 42 61 68 61. – contact@atelierdeluca.com
- ATELIER MESURE. Boutique tenues par deux frères qui sont depuis des années dans l’élégance et qui connaissent vraiment bien leur métier. Infos : www.ateliermesure.paris – 44 Boulevard de la Tour-Maubourg, 75007 Paris – tél. : 01 45 50 21 09